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Bellini, Carpaccio, Giorgione, Titien, Tintoret, Véronèse, les peintres de la Renaissance à Venise sont les magiciens de la couleur et de la lumière.

 

Trecento (14e s), l’influence byzantine

Les peintres de la Renaissance à Venise ont longtemps été très conservateurs, se méfiant des idées humanistes. De 1300 à 1450, les mosaïques qui recouvrent les voûtes et les coupoles de la basilique Saint Marc restent des modèles incontournables dans la composition. Mais peu à peu, aux mosaïques murales succède la mode de polyptyques qui viennent peupler les églises de la cité, à hauteur du regard des fidèles.

Lorenzo Veneziano, 1359, Polyptyque Lion, Gallerie dell’Accademia Venise

Paolo Veneziano, (vers 1290-1362)

Peintre officiel de la République de Venise, Paolo Veneziano fut le premier artiste vénitien à élaborer un langage pictural personnel en équilibre entre l’art byzantin et l’art gothique venu du Nord. La précision du dessin relève d’un savoir-faire de miniaturiste. Les couleurs sont utilisées avec réserve et subtilité, transformées en une riche harmonie chromatique grâce aux vertus unificatrices du fond doré.

Paolo Veneziano, 1339, Vierge à l’enfant, Basilica dei Frari

Lorenzo Veneziano, (entre 1356 et 1372)

Elève de Paolo Veneziano, Lorenzo Veneziano est encore lié à l’esthétique byzantine. Sans pour autant subir l’influence de Giotto qui travaille non loin de là, Lorenzo Veneziano devient adepte du gothique en accordant une importance accrue aux détails naturalistes. S’évadant des règles figuratives rigides, les saints et la Vierge sont rendus avec une touchante familiarité. Il introduit la sensualité de la couleur avec une gamme chromatique précieuse et des reflets de lumière, aspect le plus fondamental de la peinture vénitienne.

Lorenzo Veneziano, 1359, Polyptyque Lion, Gallerie dell’Accademia Venise

 

Quatrocento (15e s), du Gothique à la Renaissance

La naissance de la peinture vénitienne se situe au 14e siècle, lors de la rupture progressive avec l’art byzantin. Le début du Quatrocento est marqué à Venise par l’oeuvre de Jacobello del Fiore (1400 1439). C’est  la période de transition entre le byzantin tardif et le discours narratif du gothique fleuri international. Il utilise encore des thèmes classiques de la culture médiévale comme le couronnement de la Vierge.

Jacobello del Fiore, Madone de la Miséricorde, Gallerie dell’Accademia Venise

Bartolomeo Vivarini (1432-1499)

Né à Murano, Bartolomeo Vivarini est le frère d’Antonio Vivarini avec qui il travaille à la chartreuse de Bologne et à l’église Saint-François de Padoue. Bartolomeo apprend la peinture à l’huile d’Antonello da Messina mais la majeure partie de ses oeuvres est à tempera. Son style est encore profondément gothique avec des couleurs vives qui rappellent la splendeur et des verres et des émaux de Murano.

Bartolomeo Vivarini, 1474, tryptique de la Bénédiction de saint Marc en majesté et les Saints, Basilica dei Frari

Milieu du Quatrocento, la Renaissance

Vers le milieu du 15e siècle, l’expansion de la Sérénissime sur le continent s’intensifie avec l’apparition de collections ouvertes aux nouveautés étrangères. La peinture sur panneaux de bois est limitée aux petits formats tandis que la peinture sur toile offre une nouvelle liberté aux peintres vénitiens qui jouent sur l’épaisseur de la couche picturale.

Giovanni Bellini, Sainte Conversation, 1487, Gallerie dell’Accademia Venise

 

Giovanni Bellini (vers 1425 – 1516)

Considéré comme le précurseur des peintres de la Renaissance à Venise, Giovanni Bellini est le peintre le plus important de sa génération et le maître des peintres suivants de la Renaissance. Libéré du gothique tardif grâce à Andrea Mantegna, il admire la peinture flamande pour son réalisme, sa lumière et sa profondeur en perspective. L’accent est mis sur la lumière et la couleur. Ses Madones sont pensives et tendres. Ses personnages prient au-delà de toute recherche d’attitude et souffrent sans drame évident.

Giovanni Bellini, Sainte Conversation, 1487, Gallerie dell’Accademia Venise

 

Giovanni Bellini, Vierge à l’enfant entre Sainte Catherine et Marie Madeleine, 1490, Gallerie dell’Accademia Venise

 

Giovanni Bellini, Marie Madeleine, Vierge à l’enfant entre Sainte Catherine et Marie Madeleine, 1490, Gallerie dell’Accademia Venise

Giovanni Bellini, Transfiguration du Christi, 1505, Gallerie dell’Accademia Venise

 

Antonello da Messina (1430-1479)

Originaire de l’Italie du Sud, Antonello da Messina emprunte à la Flandre la technique de la peinture à l’huile qui permet d’étaler la couleur en couches transparentes successives. Le sommet de sa carrière se passe à Venise où il diffuse la technique de l’huile, obtenant des effets de précision, de douceur et d’éclat impossible à la tempera. La Vierge de l’Annonciation est une oeuvre majeure de la Renaissance italienne, toute en retenue et en sobriété.

Antonello da Messina, l’Annonciation, copie de 1480-1497, Gallerie dell’Accademia Venise

 

Jacopo da Montagnana (1450 -1499)

Peintre de Padoue, Jacopo Parisato, dit Jacopo da Montagnana, aurait passé une période d’apprentissage à Venise dans l’atelier de Giovanni Bellini au cours de laquelle il aurait participé à la création de certains polyptyques. Son plus grand professeur était cependant Andrea Mantegna. A l’Accadémie de Venise, on admire une de ses plus belles oeuvres, l’Archange Gabriel et la Vierge de l’Annonciation.

Jacopo da Montagnana, L’Archange Gabriel, 1494, Gallerie dell’Accademia Venise

Jacopo da Montagnana, la Vierge de l’Annonciation, 1494, Gallerie dell’Accademia Venise

 

Vittore Carpaccio (1465-1525)

Créant d’immenses toiles avec de nombreux épisodes, Vittore Carpaccio traite la réalité vénitienne à travers des histoires fabuleuses. La construction de la perspective est rigoureuse avec une transparence de l’air qui permet de relier les avant-plans et le lointain dans une lumière douce et dorée. Pour la légende de sainte Ursule réalisée entre 1490 et 1500, Carpaccio a réalisé huit toiles qui étaient destinées à la Scuola di Sant’Orsola.

Vittore Carpaccio, La légende de Sainte Ursule, 1496-1498, Gallerie dell’Accademia Venise

V Carpaccio (1)
Vittore Carpaccio 1510 (9)
Vittore Carpaccio 1510 (10)
V Carpaccio (2)
Vittore Carpaccio 1510 (13)
Vittore Carpaccio 1510 (7)
Vittore Carpaccio 1510 (8)

Vittore Carpaccio, Présentation de Jésus au Temple, 1510, Gallerie dell’Accademia Venise

Cinquecento (16e s), la Haute Renaissance

Malgré son déclin, Venise devient l’un des centres artistiques les plus importants d’Italie. Les peintres de la Renaissance à Venise se libèrent dans un flamboiement de couleurs. La précision s’accorde avec la maîtrise du dessin, de l’échelle, de la perspective et de l’espace. Les détails se réfèrent souvent à l’art antique. Les peintures célèbrent le corps humain avec des portraits chargés d’humanité.

Giorgione, La Tempête, 1502, Gallerie dell’Accademia Venise

Giorgione (1477-1510)

Elève de Giovanni Bellini, Giorgio da Castelfranco, dit Giorgione, arrive à Venise au début du 16e siècle. Poète, musicien, homme du monde intégré aux cercles des intellectuels aristocratiques, Giorgione a toutes les caractéristiques de l’homme du nouveau siècle. Il peint des tableaux de petites tailles destinées à des collections privées. Avec lui, les sujets profanes se multiplient avec une attention particulière apportée à la vie et aux paysages. Ses clair-obscur sont d’une infinie délicatesse. Dans sa palette, le blanc se fait lumière vibrante.

Giorgione, La Vecchia, 1503, Gallerie dell’Accademia Venise

 

Titien (1488-1576)

Tiziano Vecellio appelé Titien représente un des sommets de la peinture de la Renaissance à Venise. «Il alliait la grandeur et le côté terrible de Michel-Ange à la grâce et l’élégance de Raphaël et aux couleurs propres à la nature», disait de lui Ludovico Dolce. Devenu peintre officiel de la Sérénissime, c’est le peintre de la vitalité. L’Assomption de la Vierge commandée pour le maître-autel de la Basilique dei Frari en 1516 est une glorieuse montée au ciel de Marie éclatante de couleurs et de vie.

Titien, 1519-1526, La Madone de Ca’ Pesaro, Basilica dei Frari

Lorenzo Lotto (1480-1556)

Né à Venise, Lorenzo Lotto se forma probablement auprès de Giovanni Bellini. Son oeuvre austère trahit des influences nordiques avec une lumière froide et changeante, très éloignée de l’école vénitienne de cette époque. Ses portraits qui dépeignent des gens de la petite noblesse ou d’hommes de lettres irradient d’une beauté intérieure révélée « par la transparence d’un visage, un regard ou la molle attitude d’une main ».

Lorenzo Lotto, Portrait d’un jeune gentilhomme, 1530, Gallerie dell’Accademia Venise

 

Jacopo Tintoretto (1518-1594)

Alors que Titien est relativement conservateur, héritier de Bellini et Giorgione, la modernité à Venise est incarnée par Jacopo Robusti, dit Tintoretto, qui s’inspire du maniérisme de l’Italie centrale. Il conçoit de grands cycles décoratifs qui exaltent les gloires de Venise. On dit de lui qu’il a dépassé Titien dans la maîtrise des couleurs et du rendu de la matière. Il admire Michel-Ange qui l’inspire pour dépeindre le canon humain de manière sculpturale.

Jacopo Tintoretto, Le miracle de l’esclave, 1547, Gallerie dell’Accademia Venise

Jacopo Tintoretto, Déposition du Christ, 1550-1560, Gallerie dell’Accademia Venise

Jacopo Tintoretto (5)
Jacopo Tintoretto (7)
Jacopo Tintoretto (6)

Jacopo Tintoretto, Le Doge Girolamo Priuli reçevant l’épée et la balance de la justice, plafond de l’Atrium carré du Palais des Doges

 

Véronèse (1528-1588)

Après avoir fait son apprentissage à Vérone, Mantoue et Parme, Paolo Caliari, dit Véronèse, arrive à Venise en 1551. Il incarne l’ouverture intellectuelle et le mode de vie civil d’une société libre et avancée culturellement. Une sorte d’allégresse décorative émane de ses toiles. Ses couleurs moelleuses et tendres s’allient à la lumière pour créer une atmosphère de plaisir et d’allégresse.

Véronèse, Mariage mystique de Sainte Catherine, 1565,1570, Gallerie dell’Accademia Venise

Veronese (9)
Veronese (5)
Veronese (7)

Véronèse, Annonciation à la Vierge, 1578, Gallerie dell’Accademia Venise

 

Eglises et Musées de Venise

  • Les églises de Venise. Les églises regorgent de trésors et de peintures de l’école vénitienne de la Renaissance. Malheureusement, les tableaux sont souvent mal éclairés. L’église la plus importante qu’il ne faut pas rater est la Basilique de Santa Maria Gloriosa dei Frari où l’on peut admirer l’Assomption de la Vierge, l’une des plus belles oeuvres de Titien. L’église de la Madone dell’Orto rassemble des oeuvres du Tintoret et l’église San Sebastiano des peintures de Véronèse.
  • Scuola Grande di San Rocco. Ce palais de la Confrérie de saint Roch est un musée à la gloire de Jacopo Robusti, dit le Tintoret qui décora toutes les salles, avec plus de 60 grandes peintures sur toile évoquant des épisodes de l’Ancien et du Nouveau Testament. http://www.scuolagrandesanrocco.org
  • Palais des Doges. Siège du pouvoir politique et judiciaire et résidence des Doges, ce monument emblématique de Venise regroupe une succession de salles plus somptueuses les unes que les autres. Elles sont décorées de fresques et de tableaux des plus grands artistes vénitiens, Bellini, Carpaccio, Tintoret, Véronèse ou Titien. https://palazzoducale.visitmuve.it/fr/home/
  • Gallerie dell’Accademia. C’est l’un des musées les plus célèbres du monde. Visite incontournable pour les amateurs de la peinture vénitienne depuis ses origines jusqu’à la fin du 18e siècle. https://www.gallerieaccademia.it/

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