La Réunion est surnommée l’île aux fleurs. Sa flore est un trésor que l’on peut découvrir dans le Jardin d’Eden, un parc paysager et botanique au coeur de St Gilles.
Le rêve d’un botaniste
Le Jardin d’Eden est né en 1990 d’une plaine sableuse et rocailleuse de basse altitude et proche de la mer où seuls quelques cocotiers et bambous se dressaient. Il fallait une bonne dose de créativité à Philippe Kaufmant, ingénieur agronome et passionné de botanique, pour imaginer les futures scènes paysagères qui accueillent aujourd’hui le visiteur.
Philippe Kaufmant est né à Quimper en 1941. Curieux de tout, épris d’idéal et d’aventure, poète à ses heures, le jeune homme bouillonne d’imagination. Son diplôme d’agronomie tropicale en poche à 24 ans, il est prêt à découvrir le monde. Après un passage à Cuba, il arrive au Tchad, en Afrique. Le bonheur de vivre sous les tropiques ne le quittera plus.
Dans son petit avion qu’il pilote lui-même, il découvre Madagascar, Réunion et Maurice. Il se fixe à la Réunion où il produit des fraises, des asperges, des melons et des pleurotes. Il crée sa propre pépinière à la fin des années 1980 à partir d’espèces recueillies chez des amis. Car son rêve le plus poétique, le plus secret et le plus imaginatif qui lui tient à coeur, c’est la création d’un jardin tropical à St Gilles Les Bains.
Le Jardin d’Eden de l’Ile Bourbon
En 1689, le Marquis de Quesne publia à Amsterdam un recueil de «quelques mémoires servans d’instruction pour l’établissement dans l’Isle d’Eden» où il louait l’Ile Bourbon en l’appelant «le jardin d’Eden». C’est tout naturellement que Philippe Kaufmant baptise ainsi son parc de 2 hectares et demi qu’il inaugure en 1991. Il quittera ce monde un an plus tard, emportant pour l’éternité le spectacle de son dernier rêve réalisé. Le chant des oiseaux et le parfum des fleurs continuent aujourd’hui à parler de lui.
L’exubérance végétale
Le jardin nous plonge au coeur d’une nature tropicale luxuriante. Il offre une promenade de deux ou trois heures dans un jardin à la fois intime et touffu grâce à la présence constante de l’eau d’une nappe phréatique et d’un étang naturel. Le visiteur découvre les scènes les unes après les autres, la fraîcheur des bambous, le pont infini au-dessus des joncs, la beauté immobile du jardin zen, l’éternité d’une fleur de lotus…
Les chemins sinueux jouent avec les reliefs, les couleurs, la verticalité des arbres, la générosité des feuillages et la poésie d’une fleur juste éclose. On peut facilement s’isoler dans les chemins cachés derrière l’étang ou sur un banc abrité des regards, sous l’ylang-ylang ou la liane de Mysore.
Un jardin ethnobotanique
Le peuplement de la Réunion s’est fait avec des hommes venus d’Europe, d’Afrique puis d’Asie. L’ethnobotanique est une science qui s’intéresse aux relations existant entre le monde végétal et les hommes. Tous ont amené leurs croyances, leurs savoirs et des graines de plantes sacrées, maléfiques, aphrodisiaques, médicinales, à tisser ou à teindre, plantes à papier, à paniers, à charpentes, à pirogues et à haies…
Le Jardin d’Eden abrite 700 espèces végétales tropicales, soit l’essentiel de la flore réunionnaise, indigène et exotique, utilitaire et ornementale. Pour mettre en valeur la richesse du monde végétal, le parcours du jardin nous emmène d’une butte épicée à un trèfle médicinal, des géraniums rosat à un jardin de plantes tinctoriales. Le tout est parfaitement étiqueté avec les noms botaniques, des panneaux et des commentaires qui permettent d’approfondir la connaissance des plantes.
Le jardin renferme aussi une faune riche répartie dans le parc botanique. C’est un havre de paix pour les oiseaux, papillons, poissons, tortues et divers lézards et reptiles. Des caméléons de la Réunion appelés Endormis, Furcifer pardalis, ont trouvé refuge dans les arbres. Il y a aussi le tangue, Tenrec ecaudatus, un mammifère insectivore nocturne qui ressemble à un hérisson.
Des géants nous accueillent
A l’entrée du jardin se dresse le Ceiba pentandra. Originaire d’Amérique centrale et des Antilles, le kapokier peut atteindre 60 mètres de haut. On utilisait la fibre de la paroi interne de son fruit pour fabriquer du kapok qui servait à bourrer des coussins et des matelas. Il y a aussi des eucalyptus, Eucalyptus globulus et Corymbia citrodora au feuilles étroites qui sentent la menthe et le citron. Le jujubier, Ziziphus mauritiana, est un arbre fruitier introduit à la Réunion qui s’est naturalisé dans l’ouest et le sud de l’île.
L’arbre du voyageur, Ravenala madagascariensis, est une plante endémique de Madagascar. Cette plante herbacée ressemble à un palmier. Sa sève abondante est potable et facile à extraire d’un coup de machette, permettant de désaltérer le voyageur. Le stipe fournit des piliers et des planches tandis que les feuilles servent de panneaux muraux et de toitures des cases.
Dans la famille des palmiers, on découvre le palmier royal, Roystonea regia. Il domine le jardin avec sa silhouette majestueuse qui peut atteindre 30 mètres de hauteur. Il y a le Cocos nucifera, symbole des tropiques. Originaire du sud-est asiatique et d’Océanie, l’arrivée à la Réunion du cocotier se situe vers la moitié du 17e siècle. Il s’est probablement disséminé par la flottaison des fruits au gré des courants marins puis par des introductions.
Géant aussi, le talipot, Corypha umbraculifera, un palmier originaire de Ceylan et d’Asie du Sud Est. Ses feuilles servaient à fabriquer des supports à l’écriture. Le latanier rouge, Latania lontaroides, est endémique à la Réunion. C’est un arbre plein de ressources qui a servi à la construction des boucans, les premières habitations de l’île. Endémique de Madagascar, le Bismarkia nobilis déploie ses feuilles en éventail dans un plissage impeccable.
Le lotus sacré
Dans le jardin aquatique règne le lotus sacré, Nelumbo nucifera, une plante importante en médecine traditionnelle chinoise. Contrairement au nénuphar, sa fleur émerge nettement au dessus de la surface de l’eau. Le nénuphar, Nymphea, apprécie les eaux chaudes et calmes du bassin. Ses feuilles flottent à la surface de l’eau tout comme les fleurs qui ne restent ouvertes que le jour.
Le papyrus des marais
Le papyrus domine le marais de son feuillage fin, léger et plumeux en éventail. Originaire des rives du Nil, le Cyperus papyrus apprécie la chaleur. Une autre espèce aux feuilles plus large, le Cyperus alternifolium, ou faux papyrus, est originaire de Madagascar. Les fibres du papyrus sont utilisées depuis l’Antiquité pour fabriquer une sorte de papier de manuscrit, des nattes, des pagnes, des sandales, des barques et des cordes.
Dans cette zone humide, on trouve aussi le palmier raphia, Raphia farinifera, utilisé en artisanat et en ébénisterie. Considérée à la Réunion comme plante envahissante, l’herbe tam-tam, Hydrocotyle bonariensis, est une plante herbacée rampante aux feuilles rondes. Elle peut se consommer fraîche ou cuite.
La rose de porcelaine
La rose de porcelaine développe une des floraisons les plus spectaculaires des espèces tropicales. Originaire d’Indonésie et d’Asie du Sud-Est, la plante se nomme Nicolaia elatior. Sa fleur cireuse est tellement parfaite qu’on la croit artificielle au premier regard. Les fleurs rouges ou roses flamboyants sont utilisées dans des arrangements floraux. Les boutons floraux et les gousses de graines sont comestibles.
Le gingembre pourpre
Surnommé Gingembre pourpre à la Réunion, l’Alpinia purpurata est une très belle plante herbacée tropicale pérenne dans son milieu naturel, Indonésie, Océanie. Les petites fleurs blanches sont entourées de bractées qui s’organisent en élégants épis terminaux rouge vif. Elles sont utilisées pour confectionner des fleurs ou des couronnes.
Jardin d’Eden 155, RN 1, L’Ermitage à St Gilles les Bains. Ile de la Réunion. www.jardindeden.re
Mon voyage à la Réunion m’a offert de belles découvertes. Vous retrouverez mon reportage sur l’Ile de la Réunion et sur la Culture de la vanille, le Jardin de l’Etat à Saint Denis, le jardin de la Maison Folio, le Jardin de Cendrillon et le Jardin botanique de Mascarin , sur la fleuriste Odette Roche, sur Edmond Albion, un esclave qui a découvert la fécondation de la vanille et sur la flore de Madagascar dans les rubriques Voyages, Jardins et Découvertes, ou cliquez sur les liens.
Bonjour et merci pour ce merveilleux reportage qui me donne envie de redécouvrir le jardin d’Eden, mais aujourd’hui ce que je me demande :
c’est ce qu’est devenu Monsieur Kaufmant. Il est né en 1941, il a 3 ans de plus que moi. Que fait-il actuellement ? Peut-on le rencontrer ? Qu’est-ce qui lui a fait découvrir le projet de l’isle d’Eden du Marquis Henri Duquesne « Recueil de quelques mémoires servant d’instruction pour l’établissement de l’île d’Eden » ? Ou bien quel était le lien qui le fit s’intéresser à ce projet lancé suite à l’exode de 200 00O réformés de France chassés par la révocation de l’édit de Nantes ?
Je vous remercie. Cordialement. Anne-Marie
J’ai visité le Jardin d’Eden il y a une dizaine d’années et j’avoue que je n’ai aucune idée de ce qu’est devenu Philippe Kaufmant qui a créé de merveilleux jardin.
Bonjour,
Philippe Kaufmant est malheureusement décédé peu de temps après l’ouverture du Jardin d’Eden.
Kaufmant Philippe Robert Emile – 1941 – 1992 à St Paul.